Meredith a 29 ans, elle est architecte d’intérieur. L’année dernière elle nous dévoilait son grand projet : partir à bord de son van (qui s’appelle Mahana) à la rencontre des acteurs de l’habitat éco-responsable. A l’époque, son van, un J7 Peugeot de 1975 vert pomme, était sur le billard pour subir quelques réparations, un joli lifting et surtout accueillir un aménagement en bonne et due forme pour devenir un habitat nomade. On fait le point sur le projet de Meredith ! En voiture Simone !
Quand as-tu pris la route pour la première fois avec ton van Mahana ?
Je suis partie au mois d’avril 2022. J’avais fait une première tentative de départ au mois de novembre 2021 et j’ai vite rebroussé chemin. J’ai tenu un mois et demi mais l’hiver cela ne peut pas fonctionner : il fait nuit très tôt à partir de 17h on ne croise plus un rat ! Donc humainement c’était trop dur. Comme je n’avais pas envie de subir mon projet, j’ai préféré le décaler. Au mois de novembre je n’ai donc fait que deux « initiatives ».
Qu’est-ce que tu appelles « initiative » ?
C’est le fait d’aller à la rencontre de personnes qui ont des projets qui gravitent autour de l’habitat éco-responsables. Cela peut-être des auto-constructeurs de tiny houses ou des acteurs de la rénovation responsable. Ça peut être aussi des fournisseurs de matériaux responsables, des décorateurs qui travaillent dans cette veine.
Depuis ton « vrai » départ en avril 2022 tu as plutôt parcouru le centre et l’ouest de la France.
Oui, car j’avais vu pas mal d’initiatives dans ce coin-là. Cela m’a permis de concentrer un peu mon itinéraire. Je prends au moins une journée pour visiter, comprendre, interroger, photographier les gens que je rencontre et leur projet. Et à l’issue de cette rencontre je retranscris tout ce que j’ai vu et compris. Puis je partage mes découvertes sur les réseaux sociaux. J’ai accumulé pas mal de connaissance sur ces sujets. Depuis avril, je suis allée à la rencontre d’une dizaine d’acteurs de l’habitat éco-responsable. Et ce n’est pas fini !
Raconte-nous la vie en van ? Qu’est-ce que c’est une journée type ?
Je me réveille tôt et je lance vite ma journée. Il faut savoir que quand on vit et on travaille dans un van il faut tout ranger très vite pour passer du mode nuit au mode jour. Cela me prend pas loin de 45 minutes. Il faut vérifier que j’ai de l’eau. Je dois aussi checker que mes panneaux solaires ont bien chargé ma batterie. Et ensuite je me mets à bosser sur mes projets d’architecture d’intérieur. Je suis très productive le matin.
En général, pour déjeuner, je pars avec ma couverture, ma salade et je pars pique-niquer dans la nature. L’avantage avec un vieux van vert pomme c’est que les gens viennent à ma rencontre pour poser plein de question. Humainement c’est très chouette. L’après-midi je le consacre davantage à approfondir tous les sujets autour de l’aménagement éco-responsable.
Ça, c’est quand je travaille dans mon van. Sinon, je prends la route à bord de Mahana pour aller à la rencontre d’initiatives dès le petit matin. Et quand mes interlocuteurs me voient arriver à bord de mon van, c’est magique. Ils sont hyper surpris. Mahana est un excellent camarade pour briser la glace. Ils sont souvent surpris que je sois la propriétaire du van. C’est très drôle.
Où gares-tu ton van ?
Ma réalité est moins glamour que les clichés que l’on peut voir sur le web. Je ne gare pas mon van dans des paysages isolés et paradisiaques genre sur une falaise surplombant la mer. Je suis une femme seule, il faut donc que je fasse un peu attention. Je vais dans des aires de camping-car ou dans des campings. J’aime aussi beaucoup les mini-campings chez les particuliers. Je partage des moments avec les gens qui hébergent. En général, ils connaissent bien la région et ont plein de choses à raconter. Ce sont des moments très riches. Je reste environ 3-4 jours au même endroit. Mais c’est une erreur, il faudrait réduire mes déplacements et prendre plus le temps et savourer mes rencontres.
Comment choisis-tu les étapes de ton parcours ?
Cela peut être motivé par une initiative que je veux découvrir. Cela peut aussi être pour faire une rando sympa, visiter un musée intéressant ou prendre café dans un petit village pittoresque. Je prends du temps pour moi et cela me rend plus créative.
As-tu trouver ton rythme facilement ?
J’ai eu du mal au début. Que ce soit pour le road trip ou pour le boulot, il fallait que j’anticipe mon organisation et je ne savais pas trop comment faire. C’est très différent de ce que j’avais connu jusque-là en étant étudiante puis salariée. J’étais très inquiète de savoir si j’étais dans la bonne démarche. Heureusement, j’ai pu rencontrer et interroger d’autres nomades et comprendre comment ils géraient leur équilibre vie pro et vie perso sur la route. Et j’ai fait le constat que ma faiblesse c’est d’être en solo. C’est forcément plus dur quand on est aux manettes de sa vie pro et au volant de son van en même temps.
Mais au fait quel est ton métier ?
Je suis architecte d’intérieur nomade.
En démarrant l’aventure Mahana et mes road trip à la rencontre d’initiatives autour de l’habitat sain et durable, je savais que je voulais continuer mon métier mais je ne savais pas comment cela allait s’orchestrer. Finalement, après le long réaménagement de mon van et à la suite des premières rencontres d’initiatives, cela s’est dessiné tout seul et je me suis naturellement spécialisée dans l’aménagement de micro habitats. Je crée des aménagements pour des vans, des tiny houses, des chalets, des cabanes. Je me suis vraiment spécialisée dans les tout-petits espaces. En revanche, comme je suis architecte d’intérieur nomade, il y a des prestations que je ne fais pas, car je ne peux pas les faire. Par exemple je ne suis pas en capacité de faire un suivi de chantier.
Par ailleurs, je travaille sur des projets de rénovation responsable. Je suis en formation permanente sur cette partie. J’apprends au fur et à mesure de mes rencontres, des projets sur lesquels je travaille. Je ne sais pas tout mais, sur ce type de projets, j’ai la chance d’avoir des clients qui l’accepte. Nous essayons ensemble de trouver des solutions responsables et durables. C’est une méthode de travail très enrichissante et cela m’oblige à aborder mon métier sous un autre prisme. La question n’est plus de choisir entre deux gris mais de s’interroger sur la possibilité d’employer des matériaux biosourcés, sur le mode d’acheminement d’un matériau, sur les valeurs « responsables » des artisans qui vont travailler sur le projet, sur les qualités énergétiques de l’habitat. Bref, les enjeux de mon métier sont en train de changer et c’est bien !
Que retiens tu de ce premier road trip et quels sont tes projets à venir pour le suivant ?
Côté vie perso cela m’a appris à être résiliente car une aventure comme celle-ci est semée d’embûches. J’ai aussi eu plus de temps seule, et ce temps seule, j’ai eu besoin de le tourner vers les autres.
Côté pro aussi cela a changé ma relation aux autres. J’ai réalisé que les porteurs de projet à impact comme les clients que j’ai accompagné étaient davantage animés par un projet de vie et des valeurs plus que par un savoir-faire et des compétences techniques. Cela a complètement bouleversé ma vision de mon métier. Et cela a aussi un impact sur mes méthodes de travail : avec certains clients nous avons travaillé en mode collaboratifs et j’ai autant appris d’eux qu’eux de moi. Cette démarche fait partie de l’ADN de mon agence.
Pour le prochain road-trip, car oui, il y aura pour sûr une édition 2023, je réduirai mes temps de voyage et ferai durer mes étapes un peu plus longtemps. J’en profiterai aussi pour accueillir régulièrement différents co-pilotes. Avis aux intéressés !